De la prison Noire « Carcel Negra » à El-Aiun/Sahara Occidental je rédige ces lignes pour témoigner.
Le mercredi 13 septembre 2006 à 21h30 GMT j'ai été enlevé d'un cyber-café situé au boulevard « Hassan II / Arbi Massoud » à la ville de Tan-Tan au sud du Maroc.
Quatre (4) éléments en civils m'ont conduit vers un grand engin de couleur blanche non immatriculé dans lequel j'ai été frappé à coups de pied et de matraque dans des parties sensibles de mon corps, menottes à la main et les yeux bandés.
A ces traitements inhumains et pendant une heure de trajet, mes tortionnaires m'ont adressé de nombreuses insultes et propos racistes ainsi que des menaces de liquidation physique.
La plupart des questions qui m'ont été posées étaient à propos du conflit au Sahara Occidental et les relations que j'entretiens avec les sites Internet sahraouis, et aussi sur mes relations avec des défenseurs et militants sahraouis des droits humains dans la région et à l'étranger comme Brahim Noumria, Houcine Lidri, Mohamed Elmoutaoikil, Aminatou Haidar, Ali Salem Tamek, Fatma Ayach, Sidi Mohamed Daddach, Hmad Hammad, Brahim Sabbar et d'autres..
D'autres questions m'ont été adressées aussi sur des responsables du Front POLISARIO et des organisations internationales comme Amnesty International, Organisation Mondiale Contre la Torture (OMCT), le bureau international pour le respect des droits de l'homme, L'association française pour la solidarité avec les peuples d'Afrique, Human Rights Watch...
Sous la torture, mes quatre tortionnaires marocains m'ont demandé de donner des informations sur les points suivants :
-Les Sahraouis qui dirigent l'Intifada de l'indépendance et aussi sur l'agenda des militants sahraouis de l'intifada au Sahara Occidental, au Sud du Maroc et aux sites universitaires au Maroc.
-Les préparatifs à El-Ayoune pour le retour d'Aminatou Haidar.
-Les moyens financiers et matériels que je possède pour communiquer avec les organisations internationales, les journaux étrangers, sites Internet sahraouis, bureaux du Polisario à l'étranger...etc
-Mes participations aux manifestations des Sahraouis pour réclamer le droit à l'autodétermination et à l'indépendance.
Ensuite, Les 4 tortionnaires marocains m'ont déshabillé dans un froid atroce avant de me menacer de viol ou encore de m'enterrer vivant si je refusait de citer l'hymne marocain.
J'ai refusé catégoriquement de citer un tel hymne, un refus qui m'a coûté une longue séance de torture systématique physique et psychologique après laquelle je me suis effondré.
Quand je me suis réveillé, je me suis trouvé dans un petit véhicule entouré par deux policiers marocains qui m'ont conduit vers le siège de la sûreté marocaine (Wilaya de la sécurité) à El-Ayoune/Sahara Occidental.
Le lendemain j'ai été transféré vers le siège de la Police Judiciaire marocaine (PJ) pour une nouvelle séance d'interrogatoires musclés qui a été menée par de nombreux agents des renseignements marocains (pistolets à la main) accompagnés de responsables sécuritaires marocains comme le tortionnaire Ichi Bou Hassane (GUS), ce dernier m'a demandé mon opinion sur le projet d'autonomie proposé par le Maroc. Quand je lui ai répondu que ce projet est né handicapé et que toute solution qui ne prend pas en considération les droits du peuple du Sahara Occidental à l'autodétermination restera incapable de mettre fin au conflit.
Cette dernière déclaration m' a coûté elle aussi une nouvelle séance de torture systématique avant de me jeter dans une minuscule cellule très sale et insupportable pour un être humain et dans laquelle
je suis resté durant quelques heures avant d'être renvoyer encore une fois vers le siège de la sureté marocaine (Wilaya de la sécurité) à El-Ayoune/Sahara Occidental dans lequel on m'a fait signé des documents (PV) sous des menaces avec armes (pistolets).
Le samedi 16 septembre 2006, on m'a présenté à un juge marocain au tribunal d'El-Ayoune/Sahara Occidental avec des chefs d'accusations similaires à ceux lancés par l'état marocain contre de nombreux défenseurs et militants sahraouis des droits humains.
Avant de demander une expertise médicale suite aux actes de torture physiques , j'ai déclaré à ce tribunal marocain mon refus catégorique de ses chefs d'accusations mensongères en annonçant haut et fort que mon enlèvement et ma torture n'est qu'un acte de vengance de la part de l'Etat marocain qui a toujours essayé de freiner mes activités en faveur de l'autodétermination et l'indépendance du peuple du Sahara Occidental.
Le juge marocain d'instruction a ordonné mon transfert vers la prison Noire « Carcel Negra » dans lequel je me trouve actuellement avec plus de 18 prisonniers politiques sahraouis emprisonnés séparément avec des détenus du droit commun et dans des conditions inhumaines et catastrophiques.
PS : On m'a confisqué mon téléphone portable et mes lunettes de vue.
Ettarrouzi Yahdih, Fait à El-Ayoune/ Aiun Le 28/10/2006 (Sahara Occidental).